Par ses caractéristiques, la halle Polynorm – construite en 1958 – se prêtait parfaitement au projet pilote de réemploi d’une structure industrielle entière.
Par ses caractéristiques, la halle Polynorm – construite en 1958 – se prêtait parfaitement au projet pilote de réemploi d’une structure industrielle entière.
En Suisse, les déchets de chantier représentent les deux tiers du volume de tous les déchets. Alors que le recyclage peut induire de grosses dépenses énergétiques pour fabriquer un nouvel objet à partir de matière première existante, le réemploi se présente comme une solution avantageuse. Le terme désigne en effet toute opération par laquelle un élément – objet ou matériau – est réexploité pour un usage proche ou similaire, avec le moins de transformations possible.
Cette pratique ancestrale, tombée progressivement dans l’oubli durant l’ère industrielle, connaît aujourd’hui un certain renouveau – au niveau expérimental, tout du moins. A Fribourg, le projet POLYNORM vise ainsi à en démontrer le potentiel par la réalisation d’un cas concret et emblématique : le démontage et le réemploi d’une structure porteuse complète.
« Par sa conception légère et très innovante pour son époque, la halle industrielle POLYNORM, construite en 1958 et vouée à la démolition, représentait l’opportunité parfaite pour une expérience pilote », explique Agnès Collaud, collaboratrice scientifique à l’institut TRANSFORM – initiateur du projet – de la Haute école d’ingénierie et d’architecture de Fribourg.
Parmi les nombreux partenaires impliqués, signe de l’intérêt suscité par la démarche, l’entreprise Morand Constructions Métalliques était responsable du démontage des portiques de la structure. « Nous cherchons toujours des moyens de réduire notre empreinte environnementale. Après la réalisation – à l’été 2022 – de la première charpente en acier décarboné de Suisse, entièrement produite à partir de matériaux recyclés et d’électricité renouvelable, nous tenions à participer à ce projet pour nous positionner sur le réemploi et acquérir un savoir-faire en déconstruction », précise Jean-François Suchet, directeur général.
Un rôle de modèle
Si le bilan financier n’est pour l’heure pas favorable, l’explosion des prix de l’énergie et des matières premières pourrait rapidement changer la donne, selon Agnès Collaud. « Notre objectif premier consistait ici à créer une méthodologie de déconstruction et un modèle de réemploi à grande échelle, en mettant en évidence les freins et les leviers rencontrés lors de la mise en œuvre. Cette expérience pose beaucoup de questions sur notre façon de planifier nos bâtiments. »
Le métal n’est d’ailleurs pas le seul matériau à avoir la cote, en termes de réemploi. Au Smart Living Lab, les instituts TRANSFORM, iTEC et ENERGY – via le projet ConcReTe – ou encore le Structural Xploration Lab (SXL) cherchent à démontrer la faisabilité technique, l’efficacité environnementale et la viabilité économique du réemploi des éléments – dalles, murs, poutres ou colonnes – issus du sciage de bâtiments en béton armé. Corentin Fivet, directeur du laboratoire SXL, est particulièrement enthousiaste : « Jusqu’à présent, chaque nouveau résultat s’avère plus prometteur que le précédent. »