Photo : Emballer le poulet dans du plastique produit à partir de la kératine présente en quantité dans les plumes de l’animal en question, tel est le défi que s’est lancé un réseau de partenaires fribourgeois et suisses.
Photo : Emballer le poulet dans du plastique produit à partir de la kératine présente en quantité dans les plumes de l’animal en question, tel est le défi que s’est lancé un réseau de partenaires fribourgeois et suisses.
En 2020, près de 19 millions de tonnes de poules ont été transformées dans l’Union européenne à des fins de consommation. Mais deux-tiers seulement de la masse totale de ces volailles finissent dans l’assiette. Le reste, dont près de 10% rien que pour les plumes, est peu valorisé, voire détruit. « Parallèlement, l’industrie agro-alimentaire a massivement recours aux polymères synthétiques pour fabriquer ses emballages », constate Rudy Koopmans, le directeur du Plastics Innovation Competence Center (PICC) situé à blueFACTORY.
Et si l’on parvenait à valoriser ces énormes quantités de déchets en les transformant en plastique biosourcé ? C’est le défi ambitieux que se sont lancé les chercheurs du PICC, avec les collaborations de l’Institut ChemTech de la Haute école d’ingénierie et d’architecture Fribourg (HEIA-FR), de la Haute école spécialisée bernoise (BFH), ainsi que des entreprises Micarna, Centravo, Alma Packaging et Maillefer. Baptisé Kera, ce projet prometteur bénéficie du soutien de la Nouvelle politique régionale (NPR).
Un modèle exportable
« Les plumes de poules sont très riches en kératine », explique Rudy Koopmans. En extrayant cette protéine, les chercheurs fribourgeois sont déjà parvenus à produire – à petite échelle – des objets en plastique. A moyen terme, ils souhaitent pouvoir proposer à l’industrie agro-alimentaire des pièces moulées par injection et des films plastiques pour des applications d’emballage. « Il s’agirait de produits à la fois renouvelables, compostables et non toxiques. Par ailleurs, on créerait ainsi une chaîne de bioéconomie locale, puisque les producteurs et transformateurs de poulets n’auraient plus à exporter leurs déchets pour les faire incinérer. »
Pratiquée depuis longtemps dans certains secteurs de l’industrie, notamment la chimie, « cette approche est assez inédite dans le domaine agricole », précise le directeur du PICC. Le modèle Kera pourrait d’ailleurs, à plus long terme, être transposé non seulement à l’étranger, mais aussi à d’autres domaines de l’économie. Mais pour ce faire, il est essentiel « de prendre en compte les besoins et les sensibilités de tous les acteurs concernés, notamment les clients finaux ». Actuellement, la BFH mène une étude sociologique afin de déterminer dans quelle mesure les consommateurs sont prêts à accepter des emballages issus de plumes de poulets.